Stephan Rickauer et son équipe traquent les failles de sécurité chez Swisscom, dans les réseaux, les prestations et les applications. Ces collaborateurs du service de sécurité informatique travaillent de façon non conventionnelle: ils procèdent comme des cybercriminels.
Texte: Felix Raymann , Images: Markus Lamprecht , 23 août 2016 7 Min.
«Les contrôles de sécurité que mènent habituellement les entreprises assurent, il est vrai, une bonne protection contre les attaques informatiques, mais toutes les fuites ne peuvent pas être corrigées de façon préventive», souligne Stephan Rickauer, IT Security Analyst chez Swisscom. Raison pour laquelle l’équipe spéciale Red Team a été créée au sein du CSIRT (Computer Security Incident Response Team).
Faire sauter les dispositifs de sécurité de ses collègues fait également partie des tâches de Stephan Rickauer.
L’objectif est de prévenir les cyberattaques et d’identifier les fuites avant que quelqu’un de malintentionné ne le fasse. «Le Red Team de Swisscom est une unité spéciale qui n’existe dans aucune autre entreprise suisse», ajoute Stephan Rickauer. «L’idée est simple: on dit que les criminels ont toujours une longueur d’avance, alors mettons-nous à leur place et apprenons à penser comme eux!»
Les pirates de Swisscom travaillent, certes, comme des cybercriminels, mais uniquement sur l’infrastructure Swisscom. Ils doivent en outre documenter chaque étape de leur travail. Tenus de se conformer à un code d’éthique très strict, les membres du Red Team s’engagent à ne pas commettre volontairement d’actions destructrices et à ne pas pirater de données clients.
Outre ces «pirates maison», Swisscom charge également des personnes externes de rechercher des faiblesses dans son système informatique. Dans le cadre du programme Bug Bounty, les gratifications venant récompenser la découverte de failles dans la sécurité des produits Swisscom font l’objet d’appels d’offres publics. «Le montant des gratifications s’élève de 150 francs, pour les petits points faibles du système, à 10 000 francs, pour des fuites importantes », précise Lorenz Inglin, Head of Swisscom CSIRT.
Swisscom est également l’une des premières entreprises suisses qui mise sur cette stratégie originale. Les géants Google, Microsoft et Facebook ont déjà mis en place des programmes similaires. Et chez Mozilla, on avait opté pour un programme Bug Bounty dès 2004. Depuis, plusieurs sociétés spécialisées dans le placement de ce genre de «pirates éthiques» ont vu le jour, notamment HackerOne. Ce sont un peu comme des agences de l’emploi pour «bons hackers».
Swisscom a mis en place son propre programme Bug Bounty.
Les résultats des attaques menées sont remis au CSIRT, qui engage les mesures nécessaires afin de corriger les points faibles du système. «Nous sommes un peu comme les "pompiers du numérique" et intervenons, par exemple, lorsqu’un hacker malintentionné dégrade le site Internet d’une entreprise cliente ou quand des ordinateurs sont victimes de logiciels malveillants, ou encore quand des notebooks Swisscom se retrouvent malencontreusement dans le container à ordures», raconte Stephan Rickauer.
Globalement, la tâche du CSIRT est de protéger l’infrastructure de Swisscom, notamment contre le phishing. Cela inclut aussi la mise en place de dispositifs de sécurité, dans le cas par exemple où le routeur d’un client privé est manipulé ou bien quand des cybercriminels font du chantage à une banque cliente de Swisscom.
Le travail de l’équipe en charge de la sécurité dépend fortement des cas en cours, appelés «incidents». Stephan Rickauer rapporte qu’il faut parfois examiner un disque dur confisqué ou prévenir une attaque durant la nuit. «Nous connaissons des moments de paix et des périodes de guerre, comme nous disons. En période de guerre, nous laissons tout en plan pour nous occuper de l’urgence. Lorsque la paix règne, chacun travaille à ses projets.»
Stephan Rickauer cite cinq fausses croyances très répandues parmi les utilisateurs: